Au panthéon des flics de cinéma, il y a les iconiques et badass Harry Callahan (L’Inspecteur Harry, 1971), Martin Riggs (L’Arme Fatale, 1987), Jimmy "Popeye" Doyle (French Connection, 1971), Vincent Hanna (Heat, 1995), Frank Bullitt (Bullitt, 1968) ou John McClane (Piège de cristal, 1988).
Et puis il y a Frank Drebin, un policier au flegme aussi légendaire que les gags énormes qu’il déclenche sur son passage. Introduit à la télévision, l’inspecteur gaffeur campé par Leslie Nielsen a été le héros d’une trilogie définitivement culte, baptisée Naked Gun outre-Atlantique et Y’a t-il un flic… en France, relancée en 2025 par Liam Neeson dans le rôle de Drebin Jr.
A l’occasion de ce grand retour au cinéma, JustWatch vous dit où (re)voir les enquêtes de son illustre paternel sur les plateformes de streaming françaises, dans l’ordre de sortie. Histoire de suivre l’hilarante évolution de carrière de notre improbable enquêteur. Y’a t-il un flic pour nous faire rire ? Oui !
Police Squad ! (1982)
Il n’existe que six épisodes de Police Squad ! (1982). Et pourtant, cette série comique annulée bien trop tôt par la chaîne ABC a marqué le petit écran par son génie du gag absurde. Comme ces comédiens qui se figent dans un faux arrêt sur image pendant le générique, Abraham Lincoln qui s’invite dans chaque introduction ou des titres d’épisodes qui ne sont jamais raccords entre l’affichage à l’écran et ce que déclame le narrateur ! Toute personne qui a (sou)ri devant Angie Tribeca (2016-2018) ou Brooklyn Nine-Nine (2013-2021) se doit d’avoir vu Police Squad !.
Derrière le show, il y a David Zucker / Jim Abrahams / Jerry Zucker, l’inénarrable trio des ZAZ. Deux ans après le succès de Y a-t-il un pilote dans l'avion ? (1980), cultissime parodie de film catastrophe, les trois compères se lancent dans un pastiche de série policière et confient le rôle principal au très sérieux Leslie Nielsen, qui campait un médecin flegmatique et hilarant dans leur précédent film. Il trouve ici LE rôle de sa carrière. Et même si Police Squad ! ne durera qu’une saison, il pose les bases d’un personnage qui s’apprête à marquer le grand écran pour le meilleur… et pour le rire.
Y a-t-il un flic pour sauver la reine ? (1988)
Six ans plus tard, Frank Drebin reprend du service ! Entre-temps, les ZAZ ont peaufiné leur patte comique avec Top Secret ! (1984) et Y a-t-il quelqu'un pour tuer ma femme ? (1986). Il est temps pour eux de retrouver leur policier fétiche et sa chevelure argentée, toujours incarné par Leslie Nielsen dont l’impassible sérieux fait des étincelles au milieu de gags épiques, dont il est d’ailleurs le plus souvent le déclencheur involontaire. Entouré de son chef dépassé Ed Hocken et de son fidèle souffre-douleur Nordberg (George Kennedy et O.J. Simpson remplacent Alan North et Peter Lupus de la série), Frank Drebin est donc le héros de The Naked Gun: From the Files of Police Squad! (1988), transposé en France en un plus efficace Y a-t-il un flic pour sauver la reine ?.
Il y est question de trafic de stupéfiants, d’hypnose, de baseball et d’une visite de la Reine d’Angleterre qui vont donner lieu à des séquences hilarantes qui ont inscrit le film dans plusieurs classements des meilleures comédies de tous les temps. Mais finalement, dans cette saga -et dans le genre du spoof movie en général-, l’intrigue importe peu : elle n’est qu’une toile de fond pour un déferlement de gags de premier et d’arrière plan. Alors bien sûr, après, il faut apprécier l’humour potache et absurde et un rythme d’une autre époque, et accepter que beaucoup de scènes ou de mécaniques ont depuis été revisitées -parfois en mieux- par des Scary Movie (2000) et autres successeurs de Drebin.
Y a-t-il un flic pour sauver le président ? (1991)
C’est en solo, sans ses partenaires Jim Abrahams et Jerry Zucker, que David Zucker orchestre la deuxième enquête cinéma de Frank Drebin : Y a-t-il un flic pour sauver le président ? (1991). Un épisode qui fait se croiser le super-flic et le Président américain George Bush (incarné par John Roarke) sur fond d’attentat et de négociations sur l'utilisation des énergies fossiles. Et surtout sur fond de jalousie puisque Drebin ne se remet pas de la fin de sa relation avec la douce Jane Spencer (Priscilla Presley) et tente de la reconquérir.
Ce qui donne lieu à une nouvelle fournée de gags très sympathiques, dont une virée en char d’assaut, un mambo endiablé ou un pastiche de la scène de poterie de Ghost (1990) presque aussi mémorable que son modèle. Dans la lignée de son prédécesseur (et de Police Squad !), ce second volet cinéma s’adresse aux mêmes amateurs de non-sens et d’humour régressif, avec tout de même un rythme un peu moins soutenu qui laisse quelques « ventres mous » s’inviter dans le récit. Et là encore, il ne faut chercher ni logique ni intrigue cohérente, juste accepter que l’enquête en cours sert de scène à notre flic-gaffeur.
Y a-t-il un flic pour sauver Hollywood ? (1994)
A l’image de sa séquence d’ouverture parodiant la scène des escaliers des Incorruptibles (qui s’inspirait lui-même du Cuirassé Potemkine), Y a-t-il un flic pour sauver Hollywood ? (1994) célèbre le cinéma en faisant de Frank Drebin le seul espoir pour empêcher un attentat pendant la cérémonie des Oscars. L’occasion pour le policier de s‘essayer à la lecture de prompteur (spoiler, il ne sait pas le faire) et pour les scénaristes de nous dévoiler un extrait de l’improbable musical consacré à Mère Teresa (et qui me fait honteusement éclater de rire à chaque visionnage).
Soyons honnêtes, ce troisième opus est tout de même moins marquant que ses prédécesseurs et montre que la mécanique commence à s'essouffler et même à se répéter un peu trop. Et que certaines vannes appartiennent à une autre époque. Mais il se distingue par un grand nombre de caméos (Shannen Doherty, James Earl Jones, Raquel Welch ou Elliott Gould y font des apparitions clins d'œil) et un final prophétique qui présente l’héritier de Drebin. Les fans y trouveront évidemment leur compte, alors que les moins fans y auront la confirmation que « trop de gags tuent le gag ».
Après ce film, Leslie Nielsen incarnera à plusieurs reprises des personnages similaires dans Le Détonateur (1998), Y a-t-il un flic pour sauver l'humanité (2000) qui n’a strictement RIEN à voir avec la saga ne vous trompez pas, Scary Movie 3 (2003) et Scary Movie 4 (2006). Il nous quitte en 2010 à l’âge de 84 ans.
Y a-t-il un flic pour sauver le monde ? (2025)
La renaissance de la saga Naked Gun a connu une longue gestation. En 2009, un quatrième film avait été envisagé, opposant Leslie Nielsen à de nouvelles recrues. Quelques années plus tard, après la disparition du comédien, c’est un reboot qui était évoqué avec Ed Helms (le dentiste de la trilogie Very Bad Trip) dans le rôle de Frank Drebin. Il faudra attendre 2025 pour voir la saga trouver le chemin du grand écran, dans une suite portée par Liam Neeson. Le comédien trimballe ici son image de dur-à-cuire de Taken (2008) et autres films d’action, créant le même décalage savoureux « sérieux vs. gags » que dans la trilogie originale. Entouré de Pamela Anderson et Paul Walter Hauser, il est donc Frank Drebin Jr. (le bébé aperçu à la fin de Y a-t-il un flic pour sauver Hollywood ?), acteur et narrateur façon film-noir d’une nouvelle enquête improbable.
« D’après une histoire vraie totalement inventée », Y a-t-il un flic pour sauver le monde ? (2025) adopte la même formule que ses prédécesseurs : running-gags, durée réduite (aucun des films n’aura dépassé 1h25 !), sens de l’absurde, arrières-plans à scruter constamment, apparitions clins d’oeil (vous n’êtes pas prêts pour la « doublure » de Liam Neeson) mais aussi baisses de rythme régulières. Si c’est votre porte d’entrée vers la franchise, c’est clairement le film qui vous dira si l’esprit Police Squad / Naked Gun est fait pour vous… ou pas du tout ! Et attention pour les enfants : certaines blagues ne sont peut-être pas de leur âge (ceux qui ont pouffé, comme moi, pendant la séquence des lunettes à vision nocturne sauront de quoi je parle).